Contrairement à ce que l’on pourrait être tenté de croire, il ne s’est écoulé que 67 ans entre la toute première photo de l’histoire prise en 1826 par Nicephore Niepce et le premier cliché photographique sous-marin réalisé par Louis Boutan, un biologiste français, en 1893. Aujourd’hui, faire une photo est un réflex, un réflex numérique, celui du sportif, du touriste, du randonneur et du plongeur. Dès mes premières bulles moi aussi, celles écrites dans ce blog, j’ai eu envie de photos et vidéos pour illustrer mes articles. Et même si je prends le temps de choisir mes mots pour raconter chaque exploration sous-marine, rien ne remplace les clichés époustouflants des fonds marins que j’ai parcourus. Mais peut-on s’improviser photographe sous-marin avec la même facilité qu’on est tenté de le faire sur terre ? Quelles sont les difficultés liées à ce milieu si particulier qu’est l’eau ? Comment les contourner ? Voici quelques unes des questions auxquelles nous allons essayer de répondre dans cet article pour vous aider à réussir vos photos sous-marines.
Quelques uns des écueils de la photo sous marine
L’eau, ça mouille !
Une évidence me direz-vous. Néanmoins, mon intention n’était pas de vous vexer mais juste de vous inciter à la plus grande prudence lorsque vous choisirez votre matériel. D’autant que la matière est addictive et que l’équipement est couteux.
N’ayant pas la prétention d’être experte dans ce domaine, je vous invite déjà à lire un article récent et très synthétique qui vous indiquera les principaux types d’appareils-photo étanches que vous pourriez être amenés à acheter en fonction de vos besoins et de vos moyens : « Photo sous-marine : choisir le bon appareil selon son budget ». Un peu plus loin dans cet article, je reviendrai sur cette question essentielle du « matos »…
Et la lumière fut… (ou pas !) un élément essentiel dans la réussite d’une belle photo sous marine
La première particularité de la photo-numérique sous marine, c’est justement qu’on n’est sous l’eau. Et au premier plan des difficultés rencontrées par le plongeur, il y l’absence de lumière. Sans entrer dans des considérations trop scientifiques, il faut toutefois comprendre le phénomène : lorsque la lumière arrive sur la surface de l’eau, une partie la traverse l’eau alors qu’une autre « rebondit » et repart dans l’air. De fait, on comprend mieux pourquoi le paysage sous marin à photographier est beaucoup moins lumineux que la plage juste au-dessus.
Les couleurs se font la malle…
On vous aura prévenu : si un jour il vous arrivait de vous blesser sous l’eau, votre sang serait vert. Pour autant, cela ne serait pas dû à une modification de votre formule sanguine mais à un phénomène naturel de perception sous l’eau. Dans une eau claire, le rouge disparait à 3m, le orange à 5m, le jaune à 10m et le vert à 25. Le bleu est la couleur qui peut traverser plusieurs centaines de mètres mais lui aussi finit par laisser sa place au noir.
Ici aussi, il est question de lois physiques : Pour résumer, la lumière blanche du soleil contient toutes les lumières du spectre telles que nous les avons apprises en classe de seconde. Mais toutes les lumières ne se comportent pas de la même manière quand elles arrivent au contact de l’eau. La longueur d’onde rouge notamment, traverse l’eau beaucoup plus lentement que la longueur d’onde verte et si vous continuez à descendre, votre sang finira même par être noir.
Pour illustrer cette problématique, voici deux vidéos très « éclairantes » sur le sujet :
- la première vous montrera le sang vert du plongeur…
- La seconde vidéo vous expliquera le phénomène de façon simple et ludique
Mais, pas de panique ! Il existe des solutions qui vous permettront de capturer le rouge saisissant du récif corallien qui vous attend au tournant de votre prochaine plongée…
Les illusions d’optique
Outre le fait que le masque entraine une certaine déformation de l’image sous-marine, il faut aussi garder à l’esprit que l’eau a un effet grossissant. En plongée, les objets peuvent nous apparaître 33% plus gros qu’ils ne le sont en réalité.
Autre difficulté propre à la photographie sous-marine, l’eau entraine une réduction de notre champ de vision. D’une part, il est réduit par le port du masque mais, il l’est également par le milieu naturel : sur terre, le champ visuel est de 160 à 180° mais en milieu subaquatique, il n’est plus que de 90 à 100°.
Enfin, si vous en aviez besoin, retenez qu’il est possible d’acquérir des masques de plongée équipés de verres correcteurs ou encore des masques sur lesquels il est possible de rajouter des verres correcteurs.
Les particules qui viennent gâcher votre photo sous marine
Tout comme l’air que nous respirons, l’eau est plus ou moins chargée de particules en suspension. Leur présence est bien évidement liée à la propreté ou à la pollution de l’eau mais aussi au sens et à la force des courants.
Contrairement à ce qui se passe sur terre, lorsque l’on fait une photo sous l’eau, le flash se reflète sur ces particules ce qui impactera considérablement le résultat.
La photographie en plongée sous-marine commence sur terre
Dans un précédent article de ce blog, j’évoque la question cruciale de la maîtrise de la flottabilité en plongée. Et bien, dans cet billet qui traite de photo sous marine, cette notion doit également être au centre des préoccupations du plongeur. Si vous ne comprenez pas pourquoi, imaginez simplement que pour une raison quelconque, vous perdiez votre appareil photo… Le principe est que le lestage doit être le même avec ou sans votre appareil photo. Il va donc falloir équilibrer l’ensemble de votre matériel de photo pour que vous puissiez rester stable. La maîtrise de votre flottabilité avec votre équipement ( appareil, flash, filtres, objectifs…) est donc une condition indispensable pour réussir vos photos sous marines.
Et quelques solutions pour y remédier…
Le choix du matériel
C’est en toute logique la première qualité exigée pour un appareil photo supposé vous suivre dans les profondeurs des plus beaux sites où vous plongerez. La bonne nouvelle, c’est que pour vos premières bulles de photographe sous marin, vous pourrez commencer par un appareil photo étanche jetable. Je vous mets ici le lien vers un article récent qui compare deux appareils jetables étanches à 10 ou 15m.
Il existe également des boitiers étanches spécialement conçus pour les téléphones portables.
L’idée est séduisante… Surtout quand on sait ce que pèse le matériel de plongée qu’il faut prendre dans ses bagages lorsqu’on part à l’autre bout du monde explorer un nouveaux site de plongée. Toutefois, il faut être là aussi, être très vigilant sur les qualités du matériel. En effet, tous les 10m la pression augment d’un bar, il est donc légitime de s’inquiéter du sort de notre téléphone dans de telles conditions… Certains permettraient d’aller jusqu’à 80 mètres de profondeur. S’il y en a parmi vous qui ont déjà testé ce genre de boîtier, vos retours d’expérience sont les bienvenus !
Si vous réfléchissez à vous équiper pour de bon, il vous faudra un appareil photo numérique et un caisson étanche.
Les deux peuvent parfois être vendus ensemble mais ils peuvent aussi l’être séparément. Il est également possible d’acheter des appareils sans caissons, mais qui sont étanches jusqu’à une certaine profondeur (environ 30m) au-delà de laquelle, ce denier sera indispensable.
La plupart des appareils sont équipés d’un zoom suffisant dans de nombreuses situations de prise de vue. Mais si vous aviez besoin d’un matériel plus perfectionné, certains caissons étanches permettent d’adapter des objectifs de conversion. Le système des appareils reflex laisse la possibilité aux photographes de changer l’objectif pour s’adapter à ses besoins. Gardez à l’esprit qu’une distance optimale de prise de vue est plutôt comprise entre 60 et 120 cm et que la contrepartie de l’utilisation du zoom, c’est la perte des couleurs…
Le choix de l’équipement étant une question très technique n’hésitez pas à vous renseigner auprès de professionnels.
Selon le type de plongée que vous pratiquez (plongée en apnée ou plongée avec bouteilles), selon la profondeur à laquelle vous envisagez de descendre et selon le type de clichés que vous voulez réaliser (photo macro, proxy ou grand angle) vos besoins ne seront pas les mêmes. Si la photo macro est souvent idéale pour débuter, dès que vous aurez envie de « voir plus grand », il vous faudra des compléments optiques tels que grand-angle ou fisheye. Sur un appareil compact, ces équipements peuvent être montés ou démontés sous l’eau. En revanche, si vous avez opté pour un Reflex, c’est avant de plonger qu’il faudra déterminer le type de photo que vous voulez faire.
Enfin, pour être presque certain de ne rien perdre de la magie de vos plongées, mieux vaut opter pour un appareil FULL HD ou 4K.
Le flash pour remédier au manque de luminosité
Même si notre oeil s’habitue vite et qu’on a l’impression de voir clair, la réalité est toujours beaucoup plus sombre. De fait, les photos aussi. Etre équipé d’un flash est donc indispensable.
Bien sûr, il est tout à fait possible de commencer avec un appareil compact et un flash intégré. Ils sont suffisants dans beaucoup de situations et dans les prises de vue simples, notamment quand on débute. Mais la photographie sous marine étant une activité fortement addictive, les appareils compacts peuvent vite atteindre leurs limites et l’envie d’un flash externe va rapidement vous titiller. Le premier avantage du flash externe est bien sûr qu’il est plus puissant. Il sera donc indispensable pour une plongée de nuit ou dans le cas de photographie grand angle. Autre intérêt du flash externe, vous pourrez le positionner où vous voudrez, ce qui sera très utile pour la résolution de deux autres problèmes…
Comment reprendre des couleurs
C’est donc le deuxième avantage de l’éclairage artificiel : il permet de pallier la parte naturelle des couleurs inéluctable sous l’eau. Même si le rouge est la première couleur à disparaître, un flash externe permet la restitution de la beauté d’un magnifique corail et même celle de toute la faune colorée des fonds marins dans lesquels on plonge.
Une limite cependant à l’utilisation du flash : lorsque l’objet est trop loin, il ne sert plus à rien. A partir de 6m, la quasi totalité de la lumière qu’il émet est « absorbée » par l’eau.
Il est alors possible, dans une certaine mesure, de ramener de la couleur chaude grâce à un filtre rouge qui se visse ou s’emboite sur le caisson de l’appareil.
Savoir contourner les particules
Elles sont la cause de ce qu’on appelle « l’effet neige » et donc l’une des principales causes d’une photo sous marine ratée. Si les particules ne sont pas toujours visibles à l’oeil nu, un petit coup de flash suffit à les mettre en lumière. Et ce seront alors des centaines de petits points blancs qui viendront ruiner vos plus belles photos sous marines.
Première chose à faire : on se calme. En effet, palmer de façon trop énergique, aggravera le problème.
Second conseil : il faut diminuer la quantité d’eau éclairée entre l’objectif et le sujet mais sans oublier d’éclairer le sujet. En clair, il ne faut pas éclairer les particules qui sont proches de l’objectif et orienter le flash externe de façon à ce qu’il éclaire le sujet.
Troisième solution : ne pas prendre de photos… Parfois, les particules sont si nombreuses que même un flash déporté n’empêchera pas l’effet neige. Dans ce cas, renoncer à faire une photo sous marine pour attendre des conditions plus favorables peut être la meilleure solution.
Les retouches
Parfois, vous aurez beau avoir pris le temps de soigner votre prise de vue, de régler votre matériel, de choisir votre angle : le résultat ne sera pas à la hauteur de vos espérances. Tout ne sera pas nécessairement perdu pour autant : comme pour les photos terrestres, il est possible de retoucher ses photos de plongée. Luminosité, netteté, balance des blancs… beaucoup de réglages peuvent même se faire automatiquement et donner de bons résultats. Mais si vous n’êtes pas satisfait, il est également possible le faire en mode manuel, de façon plus minutieuse et plus personnalisée. Vous trouverez facilement de nombreux tutos sur le sujet qui vous guideront pour retoucher sans dénaturer. Lightroom ou Photoshop sont parmi les logiciels les plus connus mais il existe aussi une solution très complète et gratuite : GIMP.
Pour finir…
Je vous dirais que ce qui reste essentiel dans la photo sous marine comme dans la photo terrestre, c’est la possibilité de pouvoir approcher l’objet ou au moins de pouvoir choisir son angle de vue.
La meilleure façon de trouver sa place dans le monde du silence, est d’être soi même le plus discret et le plus silencieux possible.
C’est notamment ce que permettent deux types de plongée :
- La plongée en recycleur car l’absence de bulles permet de s’approcher au plus près de la faune (retrouvez ici un article sur mon baptême de recycleur) et cela facilite la réussite d’une belle photo sous marine.
- Et la plongée en apnée comme vous pourrez le voir sur ces clichés incroyables réalisés par Franck Seguin et exposés à l’occasion de ONE BREATH, festival photos de St Brieuc. Plusieurs de ces clichés mettent en scène Guillaume Nery dans la baie de Villefranche sur Mer. Je vous laisse imaginer la fierté et l’émotion ressenties dans mon coeur de niçoise.
2 exemples, 3 avec la photo de la une de cet article, de photos sous marines parfaites !
Je les trouve « à tomber » prises par Miguel RAMIREZ ! Waou !!! Un sujet rare à photographier… Une limace « mouton » ! Merci à lui pour l’autorisation donnée d’utiliser ses photos !
Voici ce qu’il en dit :
Costasiella sp. 01 « Shaun le mouton »2 ans que je cherchais cette espèce rarement observée et photographiée à la Réunion … Il y a quelques mois j’ai eu la chance de tomber dessus . Cette limace de mer est aussi très difficile à prendre en photo de par sa situation, sa taille et sa mobilité (2 à 5mm sur mes photos).
2 Commentaires. En écrire un nouveau
Hello Anne,
Je vais te parler de ma petite expérience de vidéaste sous marin amateur… Et plus particulièrement insister sur un boitier pour téléphone portable parce que, là, on touche au révolutionnaire!!!
J’ai eu une GoPro: limite du boitier 40 mètres, batterie limitée ne permettant de filmer en continu sur deux plongées dans une journée et de faire le tri au montage… Et puis ce fichu joint périphérique du boitier qui ne tolère pas le plus petit défaut ou grain de poussière non vu à la fermeture et alors… Catastrophe!
J’ai acheté une Tomtom Bandit: caméra sensationnelle parce que intrinsèquement étanche. Pas de boitier, la caméra est étanche! Juste une lentille à changer suivant qu’on est en extérieur ou sous l’eau et des vidéos extraordinaires en 1080 36 images secondes et batterie assumant les deux plongées quotidiennes. Mais, mais, mais… Pas d’écran de contrôle, et limite à 40 mètres. Et il m’arrive d’aller à plus de 50… Et cette caméra n’est plus produite. On en trouve en occasion qui sont vendues plus cher que le neuf!
Je suis donc passé à la Paralenz Vaquita… Investissement de 650 Euros pour une caméra intrinsèquement étanche et cela jusqu’à 250 mètres! Ecran de contrôle présent et caméra annoncée jusqu’à 3 heures d’autonomie en 1080 36 images par seconde. La réalité: un software poussif, des commandes fonctionnant de manière…aléatoire, un écran de contrôle format timbre poste et une batterie qui tient une petite heure!!! Je ne l’ai pas gardé longtemps.
Parce que j’ai rencontré le patron France de Divevolk à Marseille en mai. Il est aussi le boss de Bigblue les céléèbres lampes de plongée. Il a ce qui me semble le produit miracle.
Boitier Divevolk Seatouch Pro 3. Tu glisses ton téléphone portable dedans (adaptable à presque tous, y compris les modèles chinois Oppo, Xiaomi, et consorts…) Tu conserves les fonctions de ton écran tactile, et c’est garanti jusqu’à 80 mètres! Là où est le génie, c’est que l’intérieur de ton boitier est en équipression avec le milieu ambiant dans lequel tu te trouves: tu es à 50 mètres donc 6 bars, l’intérieur de ton boitier est à 6 bars, mais en air et pas d’eau à l’intérieur!!! Pourquoi? Parce que le boitier est relié à une vessie compressible contenue dans la poignée et qui en s’écrasant va équilibrer la pression à l’intérieur du boitier. Donc, grand écran, étanche à 80 mètres, les qualités identiques à celles de ton appareil photo de ton portable, autonomie liée à celle de la batterie de ton téléphone, si tu as la recharge par induction ça marche à travers le boitier sans l’ouvrir lorsque tu es sur le bateau, maintien de ton écran tactile, et en plus ça n’est même pas très cher!!!! Je l’utilise depuis 10 jours et jusqu’à 40 mètres et pas de problèmes. Mais c’est normal puisqu’aucun effort sur le boitier en équipression avec l’eau…
Les appareils photos ont été battus par les téléphones portables dans l’air, et ce boitier transpose leurs qualités dans l’eau… Du génie à l’état pur!
Voilà le bilan de ma petite expérience de vidéaste plongeur, et j’envisage de faire une petite vidéo Youtube sur le sujet.
En attendant: https://www.youtube.com/watch?v=Ho9gdKCYMKI
Biz et bon séjour dans les Pouilles!!!
François
Hello François!
Très intéressant commentaire qui ouvre des perspectives… A moi comme aux autres ! Si nous avons la chance de faire l’Egypte en octobre tu montreras ça à JM… Merciiii! Bises